samedi 29 septembre 2007

Société - Autopsie d'une mort annoncée


Les causes de mortalité en France sont connues, recensées, diffusées mais pas forcément combattues de la même façon. Petit zoom sur ce qui nous attend.
Grosso modo nous avons 6 chances sur 10 de mourir d'un cancer ou d'une maladie cardio-vasculaire pour 1 chance sur 20 de mourir d'un accident.
Dit comme cela ce n'est guère encourageant je sais et somme toute troublant si l'on veut bien considérer que les pouvoirs publics, et la société avec, se focalise beaucoup sur le plus petit risque, l'accident. Généraliser ne suffit cependant pas. C'est vrai que si l'on prend la catégorie des 18-25 ans par exemple, l'accident de la route domine le suicide. C'est vrai également que comme on vit de plus en plus vieux en Occident certaines causes de mortalité comme les problèmes respiratoires deviennent dominants. Enfin certains facteurs liés à notre mode de vie comme l'obésité agravent les tendances. Il n'empêche que je ressens un trouble certain à la lecture de ces chiffres et le sentiment d'une surévalutation de certains problèmes au détriment d'autres.
Les notions de risque zéro, de prévention, de principe de précaution hantent pourtant nos textes legislatifs jusqu'à modifier nos comportements. Mais pendant ce même temps, les maladies fauchent à tour de bras car même si certaines disparaissent, d'autres apparaissent.
Je ne suis peut être pas objectif ayant eu par exemple un grand père mineur silicosé mort bien trop tôt, j'ai pu mesurer l'ampleur du désastre et en même temps le refoulement de ces populations dans des mouroirs discrets et peu médiatisés. 40 000 morts ont été directement recensés mais le chiffre le plus représentatif serait 3 à 4 fois supérieur si on considère la silicose juste comme facteur déclenchant et si l'on veut bien reconnaître que dans notre pays les maladies professionnelles sont largement, et volontairement (?) sous-évaluées. D'après l'INRS d'ailleurs, avec encore environ 300 nouveaux cas reconnus par an depuis 5 ans, la silicose reste une des maladies professionnelles les plus importantes en France. L'amiante a ensuite succédé au charbon dans une aussi belle indifférence ou distance : plus de 35 000 personnes sont déjà mortes mais 60 à 100 000 sont condamnées dans les 25 ans à venir !
Pour des causes connues depuis longtemps, les premières indications sur la dangerosité de l'amiante remontent au début du... XX° siècle, le constat est déjà accablant. On peut donc facilement imaginer qu'avec la même discrétion et le même cynisme, d'autres causes sont soigneusement préservées. Sinon comment expliquer cette prédominance du cancer qui touche aujourd'hui tous les âges tous les profils sans que l'on puisse expliquer pourquoi, à cause de quoi, comment l'éviter. Les difficultés de la recherche en ces domaines sont avérés et inquiétants. Le silence des industriels, l'omnipotence de la mondialisation sont assourdissants. Le récent scandale des jouets chinois plombés n'est il finalement qu'une modeste illustration de ce qui se produit à notre insu avant d'être diffusé sans contrôle particulier ?
La santé finalement est elle véritablement un enjeu politique, un problème sociétal majeur ? Chirac avait fait de son deuxième septennat celui de la lutte contre le cancer, Sarkozy se saisit d'Alzheimer mais il y a un tel consensus bon teint que rien n'est vraiment défini. Du côté de la population, étant tous les uns les autres dans nos familles et proches touchés par ces maladies qu'il se dégage une vraie fatalité, une vraie acceptation tacite car une vraie impuissance. Il n'a qu'à comptabiliser le nombre de manifestations à caractère humanitaires obligées de se monter pour mettre en lumière telle ou telle maladie pour constater l'état de quasi abandon que ces malades et leurs familles peuvent ressentir pour en être réduits à cela.
Je ne sais quelle instance devrait intervenir mais il me semble qu'un juge de paix manque à notre système de santé et qu'il est dangereux pour nous, et demain nos enfants, d'évoluer dans un monde qui mesure la mort, son nombre, son type, son coût mais n'est pas en mesure de la limiter, d'agir en amont, d'interdire avant qu'il ne soit trop tard.
A l'heure des franchises destinées à limiter le coût de la sécurité sociale, une logique bien financière, à quand une franchise morale destinée à limiter les causes de notre insécurité médicale ?

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